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Interview
Normandie

L'Association de la monnaie normande citoyenne : vers une monnaie régionale !

Publié le 14 décembre 2017 - Mise à jour le 12 octobre 2020
La nouvelle association de la « monnaie normande citoyenne », créée le 9 novembre dernier à Lisieux et présidée par Gérard Heit, par ailleurs président de Normandie Active, a pour but d'accompagner le déploiement d’une monnaie locale à l’échelle de tout le territoire régional. La monnaie sera officiellement lancée au cours du premier trimestre 2018. Comment est né ce projet ? Quels sont ses objectifs ? Comment fonctionnera la monnaie ? Entretien avec Frédéric Sauvadet, vice-président de l'association de la monnaie normande citoyenne et président de la fédération Agnel (la monnaie locale complémentaire de Rouen et Elbeuf).

"Pourquoi une monnaie normande ?", Conseil régional de Normandie

Quels sont les objectifs de cette nouvelle monnaie normande ? Quel est l’intérêt de la démarche pour un territoire d’envergure régionale ?

Frédéric Sauvadet : Une monnaie complémentaire est un outil vers un changement sociétal. Plusieurs notions sont centrales dans le développement de ces démarches : le développement économique, l’environnement et les circuits de proximité, le lien social et les solidarités.

La vocation des monnaies locales est de recréer des liens dans un périmètre assez court. Il est dommage de constater la difficulté pour de nombreux artisans normands de grande valeur à trouver des débouchés. Certains magasins ne connaissent pas les producteurs juste à côté. L’enjeu des monnaies locales est de recréer du lien entre des personnes qui ont choses à se dire et à faire ensemble.

A l'heure actuelle, avec la monnaie locale Agnel, on se butte sur des questions de boucle. Avec la désertification rurale, la perte de l’artisanat… nous n’arrivons à "boucler nos boucles" et il faut donc étendre la zone de chalandise. Par exemple, un boulanger qui veut faire du pain bio et cherche de la farine n’en trouvera pas toujours juste à côté. Augmenter la surface de rayonnement de la monnaie pourrait répondre à ce problème.

Ce projet mobilise de nombreux acteurs en région : des collectifs citoyens, des entreprises de l'Economie de sociale et solidaire (ESS), des partenaires économiques comme la Région Normandie. Comment est née cette démarche de co-construction ?

La monnaie régionale est née d’un faisceau de rencontres entre différents acteurs. A Rouen, un groupe, actif depuis 4 ans, a mis en place la monnaie locale avec le soutien des services ESS de la Ville. La Région est elle aussi très dynamique et souhaite non seulement soutenir mais aussi être moteur. Le Président de la Région, Hervé Morin, a une vraie vision sur le sujet.

La première pierre a été posée le 9 novembre dernier avec la création de l’association de la Monnaie normande citoyenne. Cette association est le cadre légal prévu par la loi relative à l'ESS de juillet 2014 pour développer une monnaie complémentaire. Elle est présidée par Gérard Heit, le président de Normandie Active.

Le conseil d'administration rassemble une trentaine de partenaires répartis en six collèges : les membres de droit (Région Normandie, CRESS, ADEME), les partenaires (Urscop, Normandie Active, l'Adress...), les collectivités, les entreprises, les groupes locaux soutenant déjà des monnaies locales et les citoyens. Notre démarche est bien accompagnée par le Mouvement SOL qui s’appuie sur sa propre expérience en région Toulousaine.

Comme tous ces acteurs n'ont pas la même vision politique, il faut trouver un « la » pour les faire fonctionner ensemble. Ce sujet transversal peut nous permettre de sortir des clivages citoyens/institutions, ESS/économie "classique". Il y a une convergence d’intérêts par la monnaie. Tout le monde reconnait la monnaie comme un véritable outil pour répondre à leurs propres enjeux : développement économique, lien social et la solidarité, environnement...

Pour démarrer l'activité et animer la dynamique, nous allons bénéficier d'une enveloppe régionale. Il faudra ensuite trouver un modèle économique pérenne et autonome.

Des monnaies locales complémentaires sont déjà en circulation dans la région et d'autres projets sont en réflexion. Quelle articulation entre ces démarches et la nouvelle monnaie normande ?

La monnaie régionale s'appuie notamment sur l'expérience de l'Agnel, la monnaie citoyenne de Rouen et Elbeuf. Des associations, comme "le Grain monnaie locale" au Havre, ont décidé d’attendre avant de rejoindre la dynamique. D'autres monnaies complémentaires sont en cours de création, comme "Le Pepin" à Bayeux. Des contacts ont été pris. Quoiqu'il en soit, les groupes locaux et les citoyens garderont la main sur le processus d'agrément. Ils valideront ou pas l'entrée de nouveaux commerçants et entreprises dans la dynamique.

Au cours du premier trimestre 2018, la monnaie régionale sera mise en circulation via une application numérique. L'objectif est de doter le territoire d’un outil performant et simple qui permette de faire circuler la monnaie locale de façon virtuelle. Nous pourrons facilement faire de l’interopérabilité entre toutes les monnaies du territoire. Chaque monnaie aura une capacité d’échange à l’identique.

Propos recueillis par Pauline BIAN-GAZEAU

 

Illustration : carte des commerçants participants, monnaie Agnel

 

 

 

Thématiques

Transition écologique
Économie sociale et solidaire

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