Transition énergétique : de quoi parle-t-on ?
Notre modèle énergétique en constante évolution
L’énergie est ce qui permet le mouvement, l’action ; elle est la source de toute activité humaine et occupe une place centrale au cœur de nos modèles sociétaux.
Au cours de l’histoire humaine, de nombreuses transitions énergétiques ont eu lieu : l’énergie mécanique – énergie du corps humain ou animal –, l’énergie de la biomasse – celle du bois en combustion –, l’énergie fossile – celle provenant de la combustion du charbon, du pétrole ou du gaz –, l’énergie nucléaire – issue du noyau de l’atome – sont autant de découvertes et d’innovations qui ont fondamentalement bousculé et transformé nos sociétés et leurs modes de production comme de consommation.
Aujourd’hui, les enjeux écologiques et sociaux – réchauffement climatique, finitude des ressources planétaires, lutte contre la précarité énergétique, etc. – engagent, à l’échelle mondiale, une réflexion autour de la réorientation du modèle énergétique de notre société et donnent lieu à des débats qui dépassent largement le simple cadre de la production de l’énergie.
La transition énergétique qui semble se profiler a ainsi la particularité d’être moins le fruit d’une évolution scientifique et technologique – bien que le fort développement de la connaissance des énergies renouvelables soit un moteur indéniable – que le croisement d’une nécessité d’adaptation face à l’urgence climatique et ses nombreuses conséquences sur l’environnement et les sociétés humaines et d’une forte volonté citoyenne de prendre part à la transformation du modèle de production et de consommation de l’énergie.
Transformer notre modèle dans un contexte d’urgence
Depuis la révolution industrielle, une transformation majeure de l’équilibre climatique et environnemental de notre planète est engendrée par les besoins énergétiques grandissant de l’activité humaine : importantes émissions de gaz à effet de serre (GES), épuisement des ressources fossiles, pollutions environnementales diverses, production de rejets et déchets, notamment nucléaires radioactifs, etc.
En 2018, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estimait que 47% des émissions de CO2 provenaient du secteur de l’énergie, découlant principalement de l’usage des combustibles fossiles dans les secteurs de l’industrie et des transports ainsi que pour alimenter les réseaux d’énergie pour le chauffage et l’électricité. Responsable du réchauffement climatique, ces émissions génèrent alors de nombreuses conséquences environnementales dont les effets sont déjà sensibles dans notre quotidien : fonte des glaces telluriques et montée du niveau des eaux, phénomènes météorologiques plus extrêmes (tempêtes, sécheresses, etc.), diminution des réserves d’eau douce, déclin de la biodiversité et déséquilibre des écosystèmes naturels, notamment.
Issus d’un processus extrêmement lent de transformation de la biomasse, les stocks de ressources fossiles sont anciens de millions d’années et limités. Aujourd’hui, la communauté scientifique estime qu’au rythme de la consommation actuelle – sans intégrer la demande à venir des pays émergents – les réserves prouvées pourraient encore être exploitées durant environ cinquante ans pour le pétrole et le gaz et une centaine d’années pour le charbon et l’uranium.
Enfin la pollution et les risques sanitaires des énergies fossiles comme nucléaires sont maintenant reconnus – le nombre de décès prématurés liés à la pollution de l’air urbain est en constante augmentation, les accidents de Tchernobyl et de Fukushima ont montré des limites à la sécurité des installations de production nucléaire, les déversements accidentels de rejets nucléaires radioactifs ont causé des risques sanitaires majeurs et altèrent durablement les milieux naturels, tandis que la communauté scientifique ne cesse d’alerter sur les conséquences à long terme de l’enfouissement des déchets nucléaires.
>> Pour en savoir plus :
- International energy agency, CO2 emissions by sector, World 1990-2018, Data and statistics [site web – consulté le 18 mars 2021]
- Connaissance des énergies, Réserves de pétrole dans le monde [site web – consulté le 18 mars 2021]
La transition énergétique, un véritable choix de société
Face à l’urgence climatique, la transformation du modèle énergétique actuel est, pour l’ensemble des pays du monde, une nécessité absolue. Pour autant, engager une transition énergétique c’est aussi, pour chaque pays, faire le choix d’un modèle qui irrigue l’ensemble de ses activités et participe ainsi d'un véritable choix de société, dont, en France comme à l’international, la société civile se revendique aujourd’hui partie prenante.
En 1968, de forts mouvements militants transforment en lutte les réflexions écologistes du début du siècle et de l’après-guerre, notamment, en France, autour de la question du nucléaire et de la protection des terres arables (avec par exemple le combat contre l’extension du camp militaire du Larzac, dans l’Aveyron, ou contre la construction de la centrale de Fessenheim, en Alsace). Avec ce début de militantisme écologique, de nombreuses associations voient le jour en France – les branches françaises des Amis de la Terre et de Greenpeace, les Centres permanents d’initiation à l’environnement (CPIE), engagés pour l’éducation à l’environnement, et des fédérations telles que la Fédération française des sociétés de protection de la nature (FFSPN) – et des initiatives politiques émergent, à l’image de l’alliance entre le Mouvement d’écologie politique (MEP) et des Amis de la Terre à l’occasion de l’élection présidentielle de 1981.
Plus récemment, l’écologie est devenue un sujet majeur au cœur des débats politiques et de la vie citoyenne, en témoignent par exemple les marches pour le climat apparues en 2018 et rassemblant chacune plusieurs dizaines de milliers de personnes en France ; les grèves hebdomadaires pour le climat des lycéens et des étudiants organisées à l’échelle internationale par Youth for Climate ; la campagne de justice climatique l’Affaire du siècle initiée par des associations environnementales et visant à poursuivre en justice l’État français pour inaction en matière de lutte contre le changement climatique ; ou encore la proposition de 149 mesures par la Convention citoyenne pour le climat, assemblée de citoyens initiée par le gouvernement français, dans le cadre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui a ensuite pris la forme d’une association pour défendre ses propositions dans le cadre de l’élaboration de futures lois.
De ces mouvements citoyens et politiques se dégage la volonté d’œuvrer pour une transition énergétique conciliant protection de l’environnement, autonomie énergétique et justice sociale, à travers un modèle énergétique structuré autour de quatre axes d’action : privilégier des sources d’énergie et des moyens de production plus durables et moins polluants, améliorer l’efficacité énergétique des secteurs consommateurs d’énergie, réduire la consommation finale d’énergie tout en luttant contre la précarité énergétique et redéfinir la place des citoyens dans la gouvernance de l’énergie.
>> Pour en savoir plus sur la gouvernance de l'énergie, consultez l'article Acteurs de l’ESS et collectifs citoyens engagés pour un modèle énergétique durable et solidaire, réalisé par l'Avise