Initier des démarches de coopérations

Publié le 13 mars 2024 - Mise à jour le 11 avril 2024
Pourquoi coopérer avec d’autres acteurs du territoire ? Quels en sont les intérêts ? Sous quelles formes coopérer ? Afin de maximiser leur impact social et développer leurs projets, de nombreuses structures font le choix de la coopération. Les démarches existantes étant multiples, cet article vous aidera à en démêler les principaux enjeux.

Qu’est-ce que la coopération et pourquoi coopérer ?

La coopération désigne le rapprochement entre deux ou plusieurs structures qui souhaitent regrouper leurs forces afin de préserver ou maximiser leur impact social et/ou environnemental. Elle a pour but de consolider les structures en leur permettant de garder une autonomie et de maintenir leur indépendance juridique et patrimoniale.

 

Les avantages de la coopération sont multiples :

  • multiplication des capacités d’innovation et de créativité ;
  • agrégation de moyens économiques et financiers ;
  • complémentarité entre des actions portées auparavant indépendamment ;
  • capacité de résilience et d’adaptation.

La coopération fait partie du panel de stratégies que les structures de l’ESS peuvent mobiliser dans le cadre de leur développement, et notamment de leur changement d’échelle.

La notion de coopération recouvre des réalités très diverses. Si des structures peuvent coopérer tout en restant autonomes et en maintenant leur indépendance juridique et financière, la coopération peut aussi s’apparenter à des partenariats ou réseaux communs, ou encore donner naissance à de nouvelles entités créées en commun. Les niveaux d’engagement et d’implication, juridiques et financières, sont alors très différents.

Les acteurs de l'ESS, engagés dans la coopération

Pour rappel, les structures de l’ESS reposent déjà fondamentalement sur des logiques de coopération entre individus.

L’association est déjà une forme de coopération – entre individus - à travers laquelle « deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité, dans un but autre que de partager des bénéfices » (article loi 1901).

 

Il s’agit alors d’un accord contractuel, basé sur la mise en commun de connaissances (et non automatiquement de capital), dans un but désintéressé, et en mettant en place des instances de gouvernance comprenant au minimum deux membres (personnes physiques ou morales).

Créée par la loi du 17 juillet 2011, la SCIC est une entreprise coopérative (sous forme SARL, SA ou SAS) en multisociétariat, permettant d’associer plusieurs collèges de parties prenantes à sa gouvernance, afin de prendre les décisions stratégiques au sein d’un collectif représentant les acteurs concernés ou impliqués dans le projet.

 

Les collèges de parties prenantes sont au nombre de trois minimum, et doivent comprendre à minima les salariés, et les clients / usagers ; avec chacun des montants de souscription de parts sociales associées. Cette forme juridique est adaptée pour porter un projet « d’intérêt collectif », afin que toutes les parties prenantes (usagers, fournisseurs, partenaires, collectivités…) puissent participer à son développement et sa réussite.

La SCOP est une entreprise coopérative (SA, SARL, SAS) dont les salariés sont les associés majoritaires ; ils ont ainsi un rôle prépondérant dans le fonctionnement de l’entreprise (minimum 51% du capital social et 65% des droits de vote), et élisent notamment leur dirigeant.

 

Les instances de gouvernance fonctionnent selon la règle « un associé = une voix », quel que soit le capital détenu. Par ailleurs, le partage du profit y est équitable, étant redistribué entre les salariés, les associés et une part pour les réserves de l’entreprise.

Comment coopérer ?

Les éléments à prendre en compte lors du lancement d’un processus de coopération

Le choix d’entamer un processus de coopération avec d’autres structures de l’ESS est une réflexion stratégique qui ne doit pas être prise à la légère. Il implique en effet d’un processus complexe, multiacteur, qui ne doit pas se limiter à un rapprochement physique : un processus de coopération constitue un projet économique nécessitant des prises de décisions stratégiques.

 

Avant de prendre la décision de coopérer, il est important de remplir les conditions suivantes :

  1. Assurez-vous tout d'abord que les structures souhaitant coopérer sont accordées sur le contenu et les valeurs du projet commun. Pour ce faire, il peut être pertinent de formaliser ledit projet afin de s’assurer de la concordance des parties (valeurs, activités envisagées, moyens à allouer, etc.).
  2. Valorisez l’existant : la coopération se basant sur des projets préalablement mis en place par des acteurs, il s’agit de s’assurer que ces acteurs n’y perdront pas leur identité propre, afin d’intégrer la coopération dans les actions des structures souhaitant coopérer.
  3. Formalisez la gouvernance. Les structures souhaitant coopérer possèdent déjà des instances de décision et de gouvernance propre. Il est alors important de définir et formaliser comment, au sein de cette coopération, seront prises les décisions (instances, participants, fréquence de réunion, processus de prises de décision et de partage d’information).
  4. Enfin, gardez en tête la nécessité d’allouer du temps à ce processus de coopération, que ce soit pour l’interconnaissance, les temps d’échange et de prises de décision, la formalisation des actions, leur mise en œuvre…

Comment mettre en place un processus de coopération ?

La mise en place d’une coopération entre plusieurs structures est le fruit d’un processus de rapprochement. Il est souvent nécessaire de construire ce rapprochement étape par étape, en approfondissant progressivement la relation, afin de s’assurer de la décision mutuelle de coopérer.

Pour schématiser cela, la Chambre régionale de l’Économie sociale et Solidaire (CRESS) Centre-Val-de-Loire a construit l’outil suivant, qui représente les différentes étapes d’un processus de partenariat :

Infographie coopérations CRESS Centre-Val de Loire

Des démarches de coopération aux niveaux d’engagement et de formalisation variés

Après avoir mûri votre décision de mettre en place une coopération formalisée, il s’avère nécessaire de vous pencher sur les différentes formes que peut prendre cette coopération, et notamment des statuts juridiques qui peuvent y être associées.

 

Il est possible de regrouper les multiples formes possibles de coopération en trois modalités schématiques :

  1. la coopération pour mutualiser des moyens communs ;
  2. la coopération pour proposer ensemble une offre territoriale coordonnée ;
  3. la coopération pour « faire ensemble », et apporter en commun une nouvelle réponse à un besoin social.

 

Coopérer pour mutualiser des moyens communs

La coopération peut permettre à plusieurs structures de mutualiser en commun des moyens de nature différentes, par exemple :

  • des emplois ;
  • des locaux, des logiciels ou du matériel ;
  • des finances (apport au capital, trésorerie partagée) ;
  • des compétences ;
  • des informations, des connaissances ou de l’intelligence collective.

Ces souhaits de mutualiser peuvent aboutir à différents modes de coopération, présentés ci-dessous.

Le GE, structure juridique sous forme associative ou coopérative, permet aux structures de mutualiser une partie de leurs ressources humaines. Il met alors à disposition ce personnel à ses membres, dans le cadre d’activités non lucratives.

 

Le GIE est une structure souple permettant à des structures indépendantes de porter des opérations commerciales communes ou de mettre en œuvre des moyens humains ou techniques. Il permet à ces structures de mettre en commun certaines activités afin de les développer ou les améliorer, sans toutefois se substituer aux activités réalisées indépendamment par ces structures.

 

Le GIE peut ainsi porter par exemple des fonctions d’appui à la réalisation des activités cœur de métier, comme par exemple de gestion comptable, recherche de financement, gestion de services informatiques, de locations de matériels, etc.

 

Coopérer pour proposer ensemble une offre territoriale coordonnée

Un autre modèle de coopération consiste à proposer ensemble une offre territoriale coordonnée. Dans ce cadre, les différentes structures continuent à faire leur métier d’origine, mais décident de s’organiser afin de gagner en cohérence et de proposer conjointement une réponse aux besoins identifiés sur le territoire.

Cette optique de coopération peut avoir lieu sans formalisation juridique de ce rapprochement ; il peut simplement s’agit d’acteurs qui se regroupent, échangent, pour accorder leurs actions et assurer une meilleure réponse aux besoins sociaux identifiés. Cela peut inclure par exemple une meilleure articulation entre plusieurs services différents proposées par ces structures, ou une meilleure répartition sur le territoire si ces acteurs proposent un service de nature proche.

Certaines entreprises peuvent décider de répondre de façon commune à un appel à projets ou un appel d’offres, afin de mutualiser, pour une période donnée, leurs compétences, moyens matériels et financiers. Dans ce cas, elles créent un groupement momentané d’entreprises (GME). Celui-ci diffère de la sous-traitance car, dans ce cas, les co-traitants sont liés par un contrat au donneur d’ordre et responsables vis-à-vis de lui.

 

Un GES n’est pas un statut juridique, il s’agit d’un mode d’organisation entre plusieurs structures ayant une gouvernance unifiée et des moyens de gestion et de développement en commun.

 

Il est organisé avec une structure « mère » (qui porte la gouvernance du projet, avec des fonctions de direction et de gestion comptable et administrative) et des « filles » (en charge des activités de production de biens et services). Dans un GES sous forme associative, la structure « mère » est une association, généralement non fiscalisée ; les structures filles peuvent alors être sous format de SAS. Cette forme de coopération permet de coordonner son offre de service, sa stratégie RH, sa gouvernance et de mutualiser des ressources et des moyens.

 

Si l’on souhaite schématiser, les GES peuvent être créés dans deux cadres : celui d’une réflexion plutôt interne, où la structure « mère » souhaite renforcer ou diversifier ses activités et décider de créer des structures « filles » pour les porter, ou celui – plus directement axé dans une logique de coopération –, où des structures préalables décident de créer ensemble un GES pour renforcer collectivement leur capacité d’action en mutualisation des fonctions.

Coopérer pour apporter en commun une nouvelle réponse à un besoin social

Cette modalité de coopération, plus engageante pour les structures, repose sur un souhait de « faire ensemble », c’est-à-dire construire une réponse innovante à un besoin social en se fondant sur la complémentarité de leurs compétences et ressources.

Il est tout à fait possible pour deux ou plusieurs structures souhaitant créer en commun une nouvelle réponse à un besoin social, de décider de créer en commun une structure qui portera ce projet. Le statut juridique de cette structure peut alors être associatif ou coopératif (société coopérative d’intérêt collectif). Sa mission sera dans ce cas de porter ce nouveau projet commun.

 

Les structures préalables peuvent garder une indépendance sur leurs activités premières, tout en participant au fonctionnement de cette nouvelle structure, par exemple en entrant dans sa gouvernance en tant que personnes morales et/ou apportant à son capital.

Un PTCE est, selon la loi du 31 juillet relative à l’ESS, un « regroupement sur un même territoire d'entreprises de l'ESS (...), qui s'associent à des entreprises, en lien avec des collectivités territoriales et leurs groupements, des centres de recherche, des établissements d'enseignement supérieur et de recherche, des organismes de formation ou toute autre personne physique ou morale pour mettre en œuvre une stratégie commune et continue de mutualisation, de coopération ou de partenariat au service de projets économiques et sociaux innovants, socialement ou technologiquement, et porteurs d'un développement local durable ».

 

Il s’agit donc d’une structure constituée de multiples acteurs, publics et privés, qui souhaitent répondre ensemble aux besoins de leur territoire et décider de coopérer pour développer ensemble des projets économiques innovants et durables. Leurs relations partenariales et leur ancrage territorial fort leur permettent de développer leurs activités, en favorisant une économie non délocalisable et durable. 

 

L’intérêt de ces groupements repose dans la mutualisation des savoirs, connaissances, et ressources propres à chaque activité, permettant de faire conjointement ce que chaque acteur n’aurait pu porter seul, et ainsi faire émerger des innovations sociales. Cela peut par exemple prendre la forme de co-portage de nouveaux projets économiques, ou de mutualisation de locaux ou des ressources humaines.

 

La forme juridique d’un PTCE est souple : il peut être un groupement informel, prendre la formation d’une association ou d’une SCIC. Il n’y a pas forcément de structuration financière ou d’apport en capital, cependant il est important pour un PTCE de formaliser son schéma de gouvernance et son mode de prise de décision.

La joint-venture sociale est une forme de coopération très aboutie, qui unie des entreprises de l’ESS à des entreprises classiques – a minima une entreprise classique et un acteur de l’ESS -, s’associant pour créer une nouvelle structure et réaliser ensemble une mission sociale.

 

Les JVS se définissent par trois caractéristiques communes :

  1. un actionnariat ayant une forme de complémentarité, en compétences et/ou en ressources, grâce à la différence de profils entre acteurs de l’ESS et de l’économie classique ;
  2. un objectif commun : remplir conjointement une mission sociale ou sociétale
  3. un modèle économique hybride, garantie une plus grande pérennité du projet.

La JVS n’est pas en soi un statut juridique, elle peut prendre des formes variées : il s’agit toutefois généralement de SAS, qui peuvent disposer d’agréments particuliers, notamment dans l’insertion par l’activité économique - les JVS associant souvent des acteurs de l’IAE.

Quelles stratégies pour changer d'échelle

Notre guide Stratégies pour changer d’échelle vise à éclairer la notion de changement d’échelle et à en favoriser une compréhension partagée. De la diversification à la coopération, en passant par la duplication, la fertilisation et la fusion, il décrypte les différentes stratégies pour changer d’échelle et leurs conditions de réussite.

Thématiques

Coopération territoriale
Accompagnement des entreprises de l'ESS

Abonnez-vous à notre newsletter

Et tenez-vous informé.e.s des actualités de l’Avise et/ou de ses programmes

Sélectionnez la newsletter de votre choix