Actualité de l'Avise
Innovation sociale

Décloisonner l’innovation sociale : rassembler les forces vives pour construire la transition

Publié le 04 juillet 2025 - Mise à jour le 08 juillet 2025
Table-ronde des Rencontres nationales de l'innovation sociale
Ingrid Sizaret Planchard, Damien Baldin, Nadège Guiraud, Jade Omer, Camille Chapuis et Emilie Sarrazin, le 3 juin 2025
Le mardi 3 juin, l’Avise organisait à Paris une journée de rencontres dédiées à l’innovation sociale, en tant que centre national de compétences de l’innovation sociale (CNCIS) pour la France en Europe. En vue d’explorer les opportunités de décloisonnement des écosystèmes de l’innovation sociale, étaient réunis acteurs de la sphère publique et de l’ESS, financeurs et chercheurs. L’après-midi a notamment été rythmée par une table ronde sur le thème : « Décloisonner l’innovation sociale : comment rassembler les forces vives pour construire la transition ». Retour sur cette journée riche en enseignements.

Faire de l’innovation sociale un levier structurant des politiques publiques

En ouverture des échanges, François Dechy, président élu de l’Avise, et Maxime Baduel, délégué ministériel à l’ESS, ont livré une vision convergente d’une innovation sociale au cœur des réponses aux grands défis écologiques, sociaux et démocratiques. Tous deux ont plaidé pour un renforcement des moyens alloués à cette innovation, afin qu’elle bénéficie d’un soutien équivalent à celui de l’innovation technologique. François Dechy a insisté sur l’importance de l’ancrage territorial et du décloisonnement entre acteurs publics et privés, soulignant le rôle stratégique d’acteurs tels que les centres communaux d’action sociale (CCAS) dans l’analyse des besoins sociaux et l’émergence d’initiatives citoyennes.

 

Maxime Baduel a, pour sa part, appelé à faire de l’innovation sociale un véritable fil rouge des politiques publiques locales, porté collectivement par l’ensemble des parties prenantes. Il a salué la richesse et la maturité de l’écosystème français tout en rappelant les défis persistants de visibilité, de lisibilité et de financement de cette innovation sociale. Ensemble, ils ont souligné la nécessité d’un travail d’ingénierie et de coopération, pour décloisonner les approches et permettre à l’innovation sociale d’exprimer tout son potentiel et de refonder l’action collective au service du bien commun.

L’Avise, un centre national de compétences de l’innovation sociale pour porter une dynamique collective

Cécile Leclair, directrice générale de l’Avise, a ensuite souligné l’importance de créer des passerelles entre les acteurs de l’ESS, acteurs publics et au-delà, qui partagent les mêmes ambitions en matière d’expérimentation, d’innovation sociale et d’utilité sociale. Elle a insisté sur les enjeux d’interconnaissance à l’échelle nationale, frein majeur à l’émergence de partenariats et à la circulation des idées. 

 

Elle a rappelé le rôle central de l’Avise, agence dédiée à l’innovation sociale depuis sa création en 2002, qui agit autour de quatre leviers : 

Mandatée en 2020 pour porter le Centre national de compétences de l’innovation sociale (CNCIS) pour la France, l’Avise travaille désormais en lien avec les centres nationaux de compétences de tous les États Membres de l’Union européenne pour faire progresser cette dynamique. Dans ce cadre, elle porte un projet structurant sur le décloisonnement, et a appelé à prolonger cette journée d’échanges par une réflexion collective sur les suites à donner au plaidoyer pour l’innovation sociale.

Le décloisonnement en pratique, à l’échelle territoriale

Durant la première partie de table ronde, Camille Chapuis (co-directrice de Marseille Solutions) et Emilie Sarrazin (directrice des Ecossolies) ont partagé leurs approches et méthodes de travail respectives pour favoriser la coopération de tous les acteurs de leur territoire au service de l’innovation sociale

 

Forte de sa communauté des « rebelles constructifs » faite de partenaires publics, associatifs, privés ou académiques, l’association Marseille Solutions facilite leur coopération dans le montage de projets d’innovation sociale en réponse aux besoins du territoire. Son secret ? Fixer un cap pour fédérer les acteurs (« voir grand »), prototyper et tester (« commencer petit ») pour un retour d’expérience rapide (« aller vite »). La construction et le partage d’un récit sont pour elle des éléments clés pour inspirer et mobiliser les partenaires, à l’image du projet MAUMA (Musée des Arts Urbains de Marseille), parcours d’arts visuels et d’arts urbains rassemblant artistes, acteurs économiques, associatifs, universitaires et habitants de l’arrière-port de Marseille, et tirant son inspiration de Lisbonne ou encore de Miami.

 

De son côté, les Ecossolies développent un partenariat historique et de long terme avec la Métropole de Nantes, entretenu au travers de réunions politiques et techniques régulières, au service du développement de l’ESS et de l’innovation sociale sur le territoire nantais. L’association porte par ailleurs le dispositif des Fabriques à Initiatives, déployant ainsi son ingénierie dans la construction de projets de territoire en rassemblant les acteurs concernés. Enfin, le décloisonnement s’illustre aussi à Nantes par la SCIC Lieux Communs, créée en 2013 par les Ecossolies pour gérer et exploiter le Solilab, tiers-lieu d’ampleur dédiée à l’ESS. Cette coopérative rassemble dans sa gouvernance des partenaires financiers, salariés, associations, locataires engagés pour le développement d’une stratégie immobilière et foncière pour l’ESS.
 

Vers une innovation sociale plus collective au niveau national

En deuxième partie de table ronde, des acteurs nationaux sont venus compléter le panel : la fondation La France s’engage, qui accompagne et finance le changement d’échelle d’innovations sociales en France ; la 27è Région, association qui accompagne la transformation des politiques publiques sur les enjeux de transition ; la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et Ellyx, agence de R&D et d’innovation sociale.

 

Les intervenants ont illustré leur mise en œuvre du décloisonnement entre acteurs de l’innovation sociale, à travers notamment la création de lien et la formation commune entre dirigeants associatifs et hauts fonctionnaires (programme « La fonction publique s’engage ») ; l’expérimentation de la gestion de locaux collectifs résidentiels en commun pour explorer de nouveaux cadres de coopération entre bailleur social, collectivité territoriale et acteurs du quartier (la 27è Région) ou encore le financement de consortia pour décloisonner les acteurs de l’emploi et de l’accompagnement (DGEFP), en vue de répondre à des enjeux complexes et de combiner différents types d’innovation (politique, organisationnelle, économique, juridique, …), comme l’a rappelé Ellyx.
 

Dépasser les freins à la généralisation de l’innovation sociale

Pour autant, le décloisonnement ne se décrète pas et la collaboration entre acteurs variés peut faire se confronter des méthodes et cultures de travail différentes, illustrant une fracture entre les mondes parfois difficile à dépasser, comme en a témoigné Nadège Guiraud pour la 27è Région. Ingrid Sizaret-Planchard (DGEFP) est quant à elle revenue sur les défis liés à la gouvernance de ces projets. Par ailleurs, Damien Baldin, directeur de la fondation la France s’engage, a souligné le manque d’ambition politique autour de la généralisation de l’innovation sociale, en proposant aux acteurs de l’accompagnement d’aller plus loin dans la formation à l’influence et au plaidoyer. Enfin, Jade Omer (Ellyx) a conclu en répétant que le paradigme de l’innovation en France reste souvent articulé autour du prisme technologique, tandis que des outils existent pour faire évoluer les référentiels d’innovation, tels que l’échelle SRL (Societal Readiness Level, inspirée de la version technologique « TRL »).

Décloisonner, ici et maintenant

Une table-ronde lors des Rencontres de l'innovation sociale, le 3 juin 2025

La demi-journée d’échanges s’est poursuivie par des ateliers en petits groupes entre acteurs publics et de l’ESS, financeurs et chercheurs. Dans la suite des interventions de la table ronde, les discussions ont fait ressortir plusieurs enjeux clés pour décloisonner et généraliser l’innovation sociale, dont notamment l’importance de l’évaluation d’impact des innovations sociales et de sa bonne utilisation, du renforcement les liens avec la recherche en favorisant l’interconnaissance et l’acculturation mutuelle avec les acteurs de l’ESS notamment, du développement d’un plaidoyer national pour l’innovation sociale ou encore de la création de passerelles entre acteurs de l’ESS et politiques publiques tout en dépassant les cadres de coopération et les rôles habituels, pour refondre véritablement l’action publique. 

 

Ces rencontres ont constitué une première étape dans le cadre d’une dynamique plus large que lance l’Avise, en qualité de CNCIS, dans cette perspective de décloisonnement des écosystèmes de l’innovation sociale.

Thématiques

Innovation sociale
Politiques publiques

Abonnez-vous à notre newsletter

Et tenez-vous informé.e.s des actualités de l’Avise et/ou de ses programmes

Sélectionnez la newsletter de votre choix