Achats socialement responsables : de quoi parle-t-on ?
Les achats socialement responsables : définition
Les achats socialement responsables (ASR) sont une composante spécifique des achats responsables. À travers eux, la structure, publique ou privée, cherche à maximiser son impact social en privilégiant le recours aux produits et services proposés par les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS).
L’organisation acheteuse peut pour cela s'adresser à plusieurs types de structures, par exemple :
- les structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE) ;
- les structures du secteur adapté et protégé, rassemblant les entreprises et établissements qui emploient des personnes en situation de handicap ;
- les acteurs du commerce équitable ;
- les entreprises implantées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et promouvant la diversité dans leurs effectifs.
« Un achat responsable est un achat dont les impacts environnementaux, sociaux et économiques sont les plus positifs possible sur toute la durée du cycle de vie et qui aspire à réduire le plus possible les impacts négatifs. » selon la norme ISO 20 400
Des démarches d’achats socialement responsables dans les organisations publiques et privées
Les achats responsables : une démarche ouverte à toutes les entreprises
De nombreuses grandes organisations intègrent leurs achats dans une politique de développement durable ou de responsabilité sociétale. A leur niveau, les TPE/PME peuvent également agir en ce sens. Globalement, on parle d’achats responsables. Les objectifs de ces démarches peuvent être nombreux : protection de l’environnement, optimisation de l’empreinte carbone, respect des normes écologiques, achats auprès de PME socialement innovantes, soutien à l’emploi local, etc.
Selon le 14ème baromètre des achats responsables de l'ObsAr, 59 % des responsables achats considèrent très important le fait de recourir à des entreprises locales, de leur territoire ou de leur région.
La fonction ou le service achat
La fonction ou le service achat est présente dans une grande partie des organisations publiques ou privées. Plus ou moins importante selon les structures, elle peut être plus ou moins formalisée et centralisée. Elle peut être dotée ou non de ressources humaines dédiées.
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60
% du chiffre d’affaires est le montant représenté par les achats au sein des entreprises européennes¹
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100
milliards d’euros ont été consacrés à la commande publique en France en 2021, soit environ 8 % du PIB français²
Sources : Spendesk, « Le guide complet pour mettre en place une gestion des achats efficace », 2022 ; Intercommunalités de France et Banque des Territoires, La commande publique en 2021, 2022
Il s’agit donc d’un puissant levier pour agir sur des problématiques sociales ou environnementales à travers des relations adaptées avec les fournisseurs.
Quelques exemples de démarche d’achats responsables
- Renault a mis en place une politique d'achats responsables au niveau mondial pour impliquer l'ensemble de son groupe.La Société Générale a créé le « positive sourcing programme 2020 ».
- Le groupe utb, société coopérative de production (SCOP) de mille salariés du secteur du bâtiment et des travaux publics, réalise des achats responsables dans tous ses services opérationnels.
- Les grandes collectivités et établissements publics se sont dotées d’un schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables dans le cadre de la loi sur l’ESS.
Les clauses sociales d'insertion
Pour les acheteurs, une des modalités de mise en œuvre des achats responsables consiste à intégrer des clauses sociales d'insertion dans leurs marchés. Ces clauses constituent un dispositif juridique qui permet d’intégrer aux appels d’offres publics des considérations liées à la lutte contre le chômage et les exclusions. Elles favorisent ainsi l’accès des entreprises inclusives de l’ESS à la commande publique. Elles inspirent également les entreprises privées pour développer leurs achats responsables.
Il existe plusieurs modalités de mise en œuvre des clauses sociales, issues du code des marchés publics. Ces dernières années, de nouveaux textes sont entrés en vigueur, précisant ces modalités et réaffirmant l'importance de ce dispositif juridique.
Pour faire suite à la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, l'État français a promulgué de nouveaux textes, entrés en vigueur le 1er avril 2016 : l'ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et son décret d’application du 25 mars 2016.
Par mesure de simplification, ces textes ont ensuite été regroupés dans le code de la commande publique. À noter qu'un tableau de correspondance entre les anciens textes et le nouveau code a été réalisé.
1. Des modalités de mise en œuvre variées
Pour mettre en œuvre une clause sociale d’insertion intégrée dans un marché comme condition d’exécution ou critère d’attribution, une entreprise a plusieurs choix, parmi lesquels :
- embaucher directement une personne en difficulté, reconnue comme telle par Pôle emploi ou un prescripteur du service public de l’emploi ;
- recourir à du personnel mis à disposition par des structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE) : associations intermédiaires ou structures d’interim d’insertion (entreprises de travail temporaire d’insertion ou, dans certains cas, ETT classiques)
- recourir à du personnel mis à disposition par des Groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ)
- sous-traiter ou co-traiter avec un atelier et chantier d’insertion (ACI) ou une entreprise d’insertion (EI).
Exemple : Colas, grand groupe de construction, travaille avec les GEIQ et fait appel à l'intérim d'insertion pour répondre à des marchés à clauses sociales.
Dans le cadre des marchés comprenant une clause sociale en condition d’exécution (modalité la plus courante en 2020), les ETP (équivalents temps plein) réalisés le sont en premier lieu par le biais d’embauches directes. Le second moyen de réalisation le plus utilisé est la mise à disposition par une ETTI ou une ETT (Alliance Villes Emploi, La clause sociale en 2020).
2. Une mise en œuvre disparate selon les secteurs
Le saviez-vous ?
En 2020 :
- le secteur de la construction et du BTP représente un peu moins de la moitié des heures d’insertion réalisées ;
- le secteur des services à la personne et à la collectivité suit en 2ème position.
Chaque année, Alliance Villes Emploi (AVE) produit une consolidation nationale de la clause sociale d’insertion qui fait état de l’importance des SIAE dans la mise en œuvre des clauses sociales. Cette association fédère les structures qui emploient des « facilitateurs » : des experts des clauses sociales sur les territoires qui accompagnent les donneurs d’ordre dans la mise en œuvre du dispositif de clause sociale et les entreprises attributaires dans leurs modalités de réponse.
Les marchés réservés
Auparavant, seules les structures du secteur adapté et protégé pouvaient bénéficier d’un marché réservé, c’est-à-dire d'un appel d’offres leur étant directement et strictement destiné. Le code de la commande public a ouvert la possibilité, pour les acheteurs, de mettre en œuvre des marchés réservés en faveur des SIAE (article L.2113-13).
Par ailleurs, la loi dite d’accélération et de simplification de l’action publique (loi « ASAP » n° 2020-1525 du 7 décembre 2020) a levé une interdiction jusqu’alors posée par le code de la commande publique : il est désormais possible de réserver un marché à la fois aux acteurs de l’insertion et aux acteurs du handicap.
Des marchés réservés se sont également ouverts aux entreprises de l’ESS grâce aux articles L.2113-15 et 16. Ils prévoient que des « marchés ou lots d'un marché qui portent exclusivement sur des services sociaux et autres services spécifiques [...], peuvent être réservés [...] aux entreprises de l'économie sociale et solidaire [...] lorsqu'elles ont pour objectif d'assumer une mission de service public ».
La consécration du sourcing
En parallèle, pour les acheteurs publics, il est désormais clairement autorisé de déterminer en amont « la nature et l'étendue des besoins à satisfaire », autrement dit, de réaliser des opérations de sourcing (article 2111-1 du Code). Lorsqu’un acheteur souhaite mettre en œuvre une clause sociale d’insertion ou lancer un marché réservé, cette disposition lui permet de vérifier qu’il existe bien une offre d’insertion sur le territoire concerné par l’appel d’offres.