Interview
Impact social

De l'impact social aux chaînes de valeur élargies : évaluation de l'animation de la vie sociale par la Fonda

Publié le 25 février 2021 - Mise à jour le 09 mars 2021
La Fonda, think tank du monde associatif et de l'économie sociale et solidaire (ESS) propose une nouvelle approche de l'évaluation de l'impact social, donnant suite aux travaux ESS et Création de valeur menés avec l'Avise et le Labo de l'ESS. Interview avec Yannick Blanc, vice-président de La Fonda.

La Fonda s’intéresse depuis quatre ans à la création de valeur par les associations. Pourquoi avoir axé cette réflexion sur la notion de « chaîne de valeur » ?

Ce cadre d’analyse, élaboré pour analyser l’avantage compétitif des entreprises, a cependant deux caractéristiques qui le rendent parfaitement applicable à un acteur social (association, établissement, service public) :

  1. La valeur créée par l’entreprise ne repose pas sur un point fort mais sur la combinaison et l’équilibre de la totalité de ses activités, y compris les fonctions support ;
  2. La valeur n’existe que dans une chaîne de valeur reliant non seulement la totalité des activités de l’entreprise mais l’ensemble de ses interactions avec ses « parties prenantes », fournisseurs, sous-traitants, prestataires, clients et même ses concurrents.

Cette approche permet de montrer que les fonctions support ne sont pas seulement des « frais de fonctionnement » ou des « coûts de structure » mais doivent être intégrées à la dynamique et donc au financement des projets. Elle rend compte du fait qu’un acteur social n’agit jamais seul mais toujours dans un système de parties prenantes, qu’il s’agisse des partenaires institutionnels, économiques, associatifs ou des bénéficiaires.

>> Pour aller plus loin, consultez :

En quoi l’analyse des chaînes de valeur permet-elle de mesurer l’impact social ?

Parler d’impact ou d’effet sur la société, c’est considérer la société comme un milieu récepteur et supposer que l’on peut mesurer les effets de l’action « toutes choses égales par ailleurs ». Or cette approche est diamétralement opposée à l’idée même de pouvoir d’agir : la société n’est pas le réceptacle passif de l’action, elle est au contraire elle-même l’ensemble des acteurs et de leurs interactions. Croire que l’on pourrait mesurer le résultat de l’action en comparant l’état de la société avant et après, c’est faire comme si le reste de la société restait inactif. En ce sens, la notion de chaîne de valeur s’oppose clairement à celle d’impact social. Elle intègre à la fois l’idée d’interactions multiples et celle de processus continu. En filant la métaphore de la société comme écosystème, on peut alors considérer que la chaîne de la valeur sociale puise sa « matière première » dans les ressources de la société et que son efficacité peut être mesurée par le renouvellement ou l’accroissement de ces ressources.

>> Pour aller plus loin, découvrez la note d’éclairage Pouvoir d’agir et démocratie locale, support de l'intervention de Charlotte Debray lors de l’événement « Associations et démocratie locale » de 2017

Avez-vous pu vérifier l’utilité de cette approche sur le terrain ?

C’est ce que nous avons entrepris avec plusieurs centres sociaux de la Drôme et de Seine-Maritime. Il ne s’agit pas d’un travail de consultant, mais d’une démarche d’intelligence collective. La première phase, celle de la décomposition des activités et des interrelations avec les parties prenantes permet à chaque acteur de se situer sur la carte d’un écosystème et de mettre en lumière la contribution des fonctions-support à la réalisation des projets. Mais lorsqu’il s’agit de mesurer le résultat de l’action, la cartographie a fait apparaître une telle quantité de maillons dans les chaînes de valeur que la recherche d’indicateurs quantitatifs semble hors de portée. Il faut donc choisir parmi les activités celles dont les effets sont mesurables et significatifs pour le projet du centre social. Cette étape est celle des questions évaluatives : l’analyse des activités (ce que nous faisons déjà), la formulation des finalités (l’état du monde auquel nous aspirons, qu’on appelle aussi « théorie du changement ») et l’énoncé des objectifs (les résultats concrets que nous visons). Ce n’est qu’après avoir vérifié que les objectifs sont cohérents avec les finalités et compatibles avec la réalité des activités que l’on pourra rechercher des indicateurs pertinents : données quantitatives, classements de préférences, taux de satisfaction ou tout autre indice que l’on s’accorde à juger significatif. Avant de mesurer l’efficacité de ce que nous faisons, il nous faut attribuer des valeurs aux buts que nous poursuivons, c’est-à-dire délibérer sur le sens de notre action. La mesure de la valeur n’est pas un processus technique mais un acte politique.

>> Pour aller plus loin, retrouvez :

L'expérimentation des chaines de valeur menée par La Fonda a bénéficié du soutien du Fonds Social Européen (FSE) au travers d'un appel à projet visant à soutenir des démarches d’évaluation d’impact social, porté par l’Avise.

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