Décryptage
Régions et ESS

L’ESS toujours présente au sein des nouvelles politiques régionales

Publié le 03 janvier 2023
Jusqu'au début des années 2010, l'économie sociale et solidaire (ESS) n'avait pas encore vraiment trouvé sa place dans les politiques des régions françaises.
En 2014, celles-ci ont été parmi les premières à plaider pour affirmer leur rôle en matière d'ESS dans le contexte favorable du vote de la loi de 2014 et de sa promotion par les acteurs du secteur (Chambres régionales de l'ESS, Réseau des territoires pour une économie solidaire, etc.). Aujourd'hui, toutes les régions ont intégré des mesures qui prennent en compte cette autre économie.

L'ESS au sein des SRDEII

Chaque région doit élaborer des schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) pour définir ses orientations en matière d'aides aux entreprises, d'attractivité territoriale, d'économie circulaire et d'économie sociale et solidaire. L'ESS s'inscrit dans ces dernières. 

L'ESS doit s'insérer dans ce schéma depuis la loi du 31 juillet 2014. Cette loi a également institué l'obligation d'organiser tous les deux ans une conférence régionale de l'ESS (article 7 et article 8 de la loi du 31 juillet 2014).

Pour la plupart des exécutifs régionaux, 2022 a été l’année du vote de leur SRDEII pour la période 2022-2028. Dans ces documents sont posés les axes majeurs d'une politique économique régionale dans laquelle, désormais, l'ESS trouve toute sa place. 

La normalisation de l'ESS

« Trouver sa place » ne se traduit pas toujours par « une place à part ». Si la majorité des régions font une place spécifique à l'ESS, une tendance forte est de l’intégrer à l'ensemble des mesures économiques régionales. Certaines vont loin dans cette direction, comme la Région Sud (anciennement Provence Alpes Côte-d'Azur) qui, dès son précédent SRDEII (2016-2022), avait adopté un « principe d'inclusivité appliqué avec la fin de dispositifs spécifiquement réservés à l'ESS » et l'« intégration de l'ESS dans des dispositifs généralistes comme Mon projet d'entreprise ou le Fonds d'investissement pour les entreprises régionales ». L'ESS était intégrée dans un service en charge des politiques entrepreneuriales de la Région.

Cette tendance se vérifie dans d'autres régions qui parlent dans leur schéma de « décloisonnement » (Auvergne Rhône-Alpes et Hauts-de-France) ou d' « intégration » (Normandie et Bourgogne-Franche-Comté) de l'ESS dans des politiques économiques plus globales.

Un soutien renouvelé à certains dispositifs dédiés à l’ESS

Le SRDEII de l'Île de France souligne qu'il faut « encourager la création d'activités relevant de l'ESS et faciliter leur insertion dans le tissu économique local dans les territoires ruraux » afin de « réduire les inégalités sociales et territoriales ».

Plusieurs régions affichent un soutien particulier à des outils spécifiques de l'ESS, repérés comme ayant un impact fort sur les territoires : « soutien renforcé aux Scic » ou « financement des projets de coopération économique (dont PTCE) » dans les Hauts-de-France ; « inciter les dynamiques de coopérations territoriales, en capitalisant sur la mise en dynamique des PTCE », « inciter l'investissement des collectivités dans les Scic stratégiques (mobilité, numérique, alimentation...) », « poursuivre le maillage des tiers-lieux » ou « encourager les coopératives d'activités et d'emploi » en Nouvelle-Aquitaine ; « abondement des fonds des financeurs solidaires » en Occitanie ; « favoriser l'esprit d'entreprendre et faire croître le modèle coopératif » dans le Grand Est ; etc.  Autant de dispositifs ou d'intentions qui s'appuient sur des expériences concrètes d'ESS qui ont maintenant fait leurs preuves.

La vie associative, un secteur en soi

Gros bataillons de l'ESS, les associations apparaissent moins en tant que telles dans les SRDEII. En règle générale, elles sont traitées par des services spécifiques et bénéficient de dispositifs qui leur sont propres. Parmi les évolutions, si moins de régions ont mis en place des dispositifs de soutien à l'emploi associatif (ce qui n'était pas le cas il y a encore une douzaine d'années où presque chaque région disposait d'une formule adaptée), on note qu'elles ne sont plus exclues des dispositifs de droit commun lorsqu'elles répondent aux critères de ceux-ci. Autre tendance forte : « privilégier le financement sur des actions spécifiques dans le cadre d’appel à projets » plutôt que de « soutenir le fonctionnement courant des associations » comme l'explique l'Île-de-France. Une tendance qui est notable depuis 15 ans et qui semble toujours s'accentuer. Ceci dit, rappelons que seules 5,4 % des associations françaises reçoivent des subventions des conseils régionaux (Le paysage associatif français, s.d. Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau, Dalloz, 2019, page 76).

De l'ESS à l'entrepreneuriat engagé

Plusieurs régions, tout en identifiant bien les spécificités du secteur, souhaitent aussi promouvoir plus largement un entrepreneuriat responsable, vers plus d’impact. 

En Occitanie, par exemple, le nouveau SRDEII affiche une priorité en lien avec l'ESS par « une ouverture plus large à "l'entrepreneuriat engagé". L'objectif visé est d'accompagner l'ensemble des entreprises régionales vers une prise en compte de leur impact social, environnemental et territorial (objectif fixé : 50 % des entreprises régionales ayant initié une démarche de transformation d'ici 2027) ». Pour cette région, il faut accélérer l'engagement « de toutes les entreprises régionales » en rendant attractif l’entrepreneuriat engagé dans l’ensemble des sphères économiques et éducatives, et en outillant les entreprises souhaitant approfondir leurs engagements sociétaux.

De même, avec d'autres mots, la région Grand Est revendique le « développement des entreprises porteuses d'activité d'utilité sociale en les soutenant dans leurs investissements. ». En Guadeloupe, le soutien et la promotion de « nouvelles formes d'économie collaborative » s'inscrit dans un objectif plus spécifique, mais ambitieux : « Faire de l'ESS un levier de croissance » pour le territoire.
En Nouvelle-Aquitaine, on veut « accompagner le transfert et la diffusion des modèles de l'ESS dans l'économie » et « diffuser les innovations sociales développées par les acteurs de l'ESS au sein de l'économie "traditionnelle" ».
De la même manière, la Région Sud affiche dans son nouveau schéma « une stratégie économique 100 % climat positif » qui intègre l'ESS au titre du soutien « à l'économie résidentielle et de proximité ».

Olivia Grégoire, déclarait en 2020 en tant que secrétaire d'État chargée de l'Économie sociale, solidaire et responsable : « Nous allons essayer de faire en sorte que l'ESS inspire l'économie normale ». Pari en passe d'être gagné au regard des politiques régionales telles qu'elles s'expriment dans les SRDEII.

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