Gouvernance dans l’ESS : de quoi parle-t-on ?
La démocratie, un principe au coeur de l'économie sociale et solidaire
Les structures historiques de l’ESS – associations, coopératives et mutuelles – ont vu le jour au XIXᵉ siècle. Fondées sur un idéal de partage du pouvoir, de la propriété et des connaissances, elles poursuivent des objectifs similaires, à savoir la recherche d’égalité, de justice sociale et de citoyenneté économique.
En reconnaissant la gouvernance démocratique comme le deuxième pilier de l’économie sociale et solidaire, la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire encourage toutes les organisations de l’ESS, les « statutaires » comme les sociétés à statut commercial qui souhaitent appartenir à l’ESS, à renforcer le caractère démocratique de leur gouvernance.
L’article 1 pose en effet l’obligation d’« une gouvernance démocratique, définie et organisée par les statuts, prévoyant l’information et la participation, dont l’expression n’est pas seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des salariés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise ».
Au sein des organisations, la gouvernance démocratique s’appuie sur :
- des règles formalisées : statuts, charte éthique, règlement intérieur, etc. ;
- des pratiques reflétant ces valeurs démocratiques qui, prises dans leur ensemble, forment la culture de l'organisation : interactions entre les membres, méthodes de réunion, circulation de l’information, etc.
Faire vivre une gouvernance démocratique revêt un sens particulier dans l’ESS : cela permet d’incarner leur finalité sociale ou solidaire. Si l’ESS s’est développée historiquement sur la base des coopérations de moyens, elle a tendance aujourd’hui à placer les enjeux de coopération entre acteurs au cœur de sa stratégie.
Gouvernance, quelques éléments de définition
Au sens large, la gouvernance renvoie à la manière dont le pouvoir est organisé et exercé dans une organisation. Plus précisément, la gouvernance constitue l’ensemble des règles d’organisation et de répartition des pouvoirs entre les instances de la structure édictées pour diriger et gérer une activité (implication, représentativité et responsabilités des parties prenantes, chaînes de décision, etc.).
Elle s’organise autour de deux niveaux de prise de décision : stratégique et exécutif.
La gouvernance démocratique est, elle, un mode de gouvernance dans lequel le fonctionnement de l’organisation, la fabrication des décisions et les relations entre les membres sont régis selon des pratiques démocratiques fondées sur la transparence, la participation et la collaboration.
Ces principes peuvent se traduire de différentes façons et de manière plus ou moins approfondie selon la sensibilité des organisations.
La loi de 2014 et le Guide des bonnes pratiques de l’ESS du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (CSESS) liste toutefois un ensemble de caractéristiques communes qui fondent le socle élémentaire d’une gouvernance démocratique :
- la formalisation des règles de fonctionnement ;
- l’élection des représentants par les membres ;
- la non-indexation du pouvoir des membres sur leur poids économique au sein de l’organisation ;
- l’information et la participation des parties prenantes qui contribuent à l’activité de l’organisation ou en bénéficient (salariés, bénévoles, clients, fournisseurs, partenaires, territoire…) ;
- la séparation et l’équilibre des pouvoirs (président-directeur, directoire-conseil de surveillance, conseil d’administration-comité parties prenantes…) ;
- la représentativité et la pluralité de la composition des instances dirigeantes, à tous les niveaux de l’organisation.
Ces éléments constituent les règles “institutionnelles” de base, mais ne sauraient suffire à faire vivre une véritable culture démocratique.
Pour cela, il est primordial de donner un sens au projet de gouvernance démocratique (en quoi résonne-t-il avec le projet social ou sociétal de l’organisation ?) et de faire en sorte que les principes de transparence, de participation et de collaboration animent la vie quotidienne de l’organisation, au-delà de leur simple inscription dans les statuts.
La gouvernance partagée constitue enfin un mode de gouvernance reposant sur la volonté de privilégier les relations de coopération et de développer l’autonomie des membres, notamment par la répartition des responsabilités. Comme pour la gouvernance démocratique, elle se structure autour des trois principes que sont la transparence, la participation et la collaboration. La gouvernance partagée n’est pas nécessairement synonyme de « gouvernance horizontale ».
La gouvernance partagée vise l’engagement de l’ensemble des acteurs de l’organisation dans la décision et implique une redistribution du pouvoir et de la responsabilité. Les décisions se font au niveau pertinent le moins élevé possible, avec la participation des acteurs directement concernés (subsidiarité et décentralisation) et dont les avis sont reconnus comme équivalents (principe d’équivalence).
Article conçu sur la base d’un dossier réalisé avec Démocratie Ouverte.