Interview
ESS et santé

La Croix-Rouge française : comment innover au service de la santé ?

Publié le 27 avril 2020
Questions à Murielle Jamot, Directrice des métiers et de la formation, qui nous présente les dynamiques d’innovation à l’œuvre à la Croix Rouge française dans les champs de la santé, du secteur sanitaire et médico-social.

Comment émerge l’innovation à la Croix-Rouge française ? 

La Croix-Rouge française, auxiliaire des pouvoirs publics dans ses missions humanitaires, est au cœur des politiques publiques. Cela nous permet de partir d’enjeux nationaux pour imaginer des solutions et les tester dans nos établissements. Les idées peuvent aussi venir des professionnels. 

La méthodologie employée est toujours la même : nous constituons des groupes de travail, notamment composés de gestionnaires d’établissements. Ensemble, nous construisons le projet et recherchons des financements auprès de mécènes privés, auprès de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA)… Nous aidons les établissements à mettre en œuvre le projet. 

En 2017, la Croix-Rouge française s’est dotée d’une direction déléguée à la stratégie et l’innovation pour plus de transversalité. Cette direction porte un accélérateur pour accompagner les projets d’innovation sociale

Quels types d’innovation voient le jour au sein de la Croix-Rouge française pour répondre aux besoins de santé ?  

Les exemples sont nombreux ! 

Dans le champ sanitaire, la Croix-Rouge Île-de-France a mis en place des consultations infirmières pour les migrants. Comme le dispositif fonctionnait bien, l’Agence régionale de santé (ARS) Île-de-France a proposé de mettre en place des consultations médicales avec d’autres acteurs du territoire, comme le Samu Social. Autre exemple : notre établissement Soins de suite et de réadaptation pédiatrique Bois Larris à Lamorlaye dans l’Oise, spécialisé sur les troubles de la marche, dispose d’une plate-forme d’analyse de la marche, ce qui lui permet de préparer les interventions chirurgicales et faciliter la rééducation.

Dans le champ de la santé, l’hôpital des Massues à Lyon a développé Minidocs, un logiciel d’évaluation de la douleur pour les enfants. Grâce à la réalité augmentée qui distrait l’enfant, Minidocs permet de diminuer la douleur des enfants paralysés cérébraux, âgés de 3 à 7 ans.

La dimension numérique occupe-t-elle une place importante dans l’ensemble de vos projets d’innovation ? 

Cela dépend ! Dans le handicap, je pense à deux projets qui ont une forte dimension numérique. Nous avons installé un logiciel de communication alternative améliorée (CAA) dans tous nos établissements pour aider les personnes en situation de handicap qui ne peuvent pas s’exprimer. Selon leurs capacités, l’outil leur permet de communiquer en clignant de l’œil par exemple.

Nous travaillons aussi au développement d’un chatbot (robot conversationnel) pour la détection précoce de l’autisme. Ce projet est né d’une collaboration entre des professionnels de la petite enfance, les parents et les professionnels de santé et du handicap. Chacun fait part des comportements de l’enfant et le chatbot, grâce à un algorithme, calcule ce qui est du développement « normal » ou non de l’enfant et oriente celui-ci vers une consultation spécialisée. Ce robot de dépistage est en cours de développement puis sera testé dans 3 crèches en Île-de-France.

Nous sommes aussi en train de finaliser la plateforme Hobbynôme. Son objectif : mettre en relation des personnes en situation de handicap et des bénévoles, autour d’actions culturelles. Ce projet sera testé à partir du mois de décembre dans notre établissement pour adultes à l’Escarène dans les Alpes-Maritimes.

 

 

Comment financez-vous ces nouveaux projets ?  

Sur la phase d’expérimentation, nous recherchons des mécènes privés, des acteurs publics comme la CNSA.  Pour le dispositif Ehpad@DOM, nous avons fait une demande d’aide dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 pour lancer huit autres nouveaux projets du même type.

Certains projets novateurs se généralisent ensuite, comme la télémédecine. Au début, il s’agissait d’expérimentations et maintenant la télémédecine relève de financements de droit commun. D’autres projets s’arrêtent quand le principal financeur se retire. Cela pourrait arriver avec les consultations infirmières auprès des migrants si l’ARS d’Île-de-France cessait de soutenir le programme. 

Pour les outils de communication alternative améliorée, nous avons proposé que le produit appartienne à la Maison départementale des personnes handicapées et qu’elle le mette à disposition de l’enfant le temps nécessaire. C'est une forme de mutualisation des coûts pour éviter que le reste à charge ne soit trop important. Ce modèle est courant dans les pays d’Europe du Nord. 

Nous menons un travail de plaidoyer en parallèle du développement de projets. Nous recherchons en même temps de nouvelles idées et de nouvelles lignes de financement pour essayer de faire bouger les politiques publiques. Pour notre dispositif Ehpad@DOM, notre ambition est qu’il soit repris dans le cadre des travaux Grand Âge et Autonomie, du Ministère des solidarités et de la santé.

Présentation de la Croix-Rouge française

La Croix-Rouge française gère, partout sur le territoire, des centres de santé, des structures pour personnes âgées (Ehpad), des établissements pour personnes en situation de handicap, des crèches, des dispositifs de la protection de l’enfance, des structures dans le champ de l’exclusion, des centres d’hébergement d’urgence, etc.

L’association compte près de 60 000 bénévoles et plus de 17 000 salariés présents sur l’ensemble du territoire.

>> Pour en savoir plus, retrouvez l'ensemble du dossier ESS et santé, publié par l'Avise en mars 2020.

Thématiques

Innovation sociale
Numérique Santé Silver économie

Abonnez-vous à notre newsletter

Et tenez-vous informé.e.s des actualités de l’Avise et/ou de ses programmes

Sélectionnez la newsletter de votre choix