Contexte

Le secteur du tourisme social et solidaire en France

Publié le 02 juin 2023 - Mise à jour le 23 août 2023
En France, le secteur du tourisme social et solidaire rassemble une grande diversité d’acteurs, qui agissent pour concilier départ en vacances pour tous, respect des territoires d’accueil, de leurs populations et de l’environnement.

La naissance des acteurs du tourisme social et solidaire

Depuis la fin du XXe siècle, le temps libre des Européens ne cesse d’augmenter,  grâce à l’allongement de la durée de vie d’une part (passée de 500 000 à 700 000 heures) et, d’autre part, à la réduction du temps de travail de près de deux tiers en un siècle, notamment du fait de l’instauration de droits comme les congés payés (environ 70 000 heures travaillées en moins). Cette nouvelle donne sociale, décrite par le sociologue Jean Viard dans ses écrits, a permis la démocratisation de pratiques culturelles telles que le tourisme.

 

À la fin du XIXe siècle, de premières associations, comme la Ligue de l’enseignement, fondée en 1886, et les premiers mouvements d’Auberges de Jeunesse, nés en Allemagne dans les années 1920, proposent des activités de loisir sportives et éducatives et ouvrent des hébergements collectifs. Le mouvement s’amplifie après 1936, avec la multiplication des maisons familiales de vacances, à l’initiative d’organisations familiales et confessionnelles proches de l’éducation populaire. Après la Seconde Guerre mondiale, la création des comités d’entreprise et de la Caisse nationale d’allocations familiales (CAF)  permet l’attribution d’aides financières aux vacances pour les salariés et les familles ainsi que la création d’un parc important d’équipements de vacances (240 000 lits progressivement construits entre les années 1950 et 1980 par les grands comités d’entreprise). 

 

Villages vacances, auberges de jeunesse, centres de vacances, refuges, voyages adaptés, séjours linguistiques… Les mouvements d’éducation populaire, de jeunesse, les mouvements politiques ou encore confessionnels se sont mobilisés pour l’apprentissage et l’acculturation de l’ensemble des classes sociales au départ en vacances, participant ainsi de l’importante croissance du nombre de partants. Au fil des années, l’offre du tourisme social et solidaire s’est diversifiée et structurée pour proposer des activités de loisir et des vacances de qualité, accessibles à tous : enfants, jeunes, familles, retraités, personnes aux revenus modestes ou en situation de handicap. 

De nombreux acteurs engagés pour rendre effectif le droit aux vacances

En France, le concept de tourisme social et solidaire regroupe à ce jour l’ensemble des structures à but non lucratif qui se mobilisent pour  rendre effectif le droit aux vacances (associations, fondations, coopératives, entreprises commerciales de l’ESS). L’UNAT, réseau de référence du tourisme social et solidaire, rassemble aujourd’hui ses membres autour de quatre grands secteurs d’activité : les villages vacances, les séjours collectifs pour enfants et adolescents, le tourisme des jeunes et les voyages. 

 

Loin d’être marginal, le secteur du tourisme social et solidaire rassemblait plus de 1 600 établissements en 2018, accueillant 5,3 millions de vacanciers pour 19,3 millions de nuitées. 

 

Parmi ces 1 600 établissements, 106 établissements sont labellisés « Tourisme et Handicap » soit 6,4 % du parc. Le tourisme social et solidaire est une branche de poids dans la filière : il représente 1,1 milliard d’euros sur un total de 55,5 milliards d’euros de recettes liées au tourisme en France en 2018.  Cette forme de tourisme est de surcroît fortement créatrice d’emplois – le nombre d’emplois généré y est supérieur à celui produit dans les structures « classiques » – et ses équipements sont plus équitablement répartis sur le territoire, qu’il s’agisse des espaces urbains ou des zones de littoral, de montagne ou de campagne. 

 

Sous-secteur du tourisme social et solidaire, la branche des séjours organisés équitables a son propre réseau pour représenter les voyagistes, l’Ates, fondé en 2006. Trente ans après son apparition, cette forme de séjour reste un marché de niche en France : en 2019, environ 3 500 voyageurs ont réalisé des séjours organisés par les voyagistes membres de l’Ates. Ce chiffre s’explique par la taille limitée des groupes – principe clé de cette alternative au tourisme de masse – par le coût relativement élevé des séjours et par la méconnaissance de l’offre. 

Un environnement plus concurrentiel et des aides publiques qui se font plus rares

Le secteur fait face à une  montée en gamme des opérateurs touristiques du secteur marchand, au développement d’une  offre de séjours à bas prix  et au fort développement des  plateformes de réservation en ligne. Pour se démarquer, les structures du tourisme social et solidaire tentent de souligner leurs valeurs de mixité et d’accessibilité et de valoriser la diversité et l’attractivité de leur offre. Cela passe par des efforts de communication, car le secteur reste trop souvent mal compris et perçu comme proposant des prestations de faible qualité, de confort moindre et s’adressant à un public spécifique. 

 

La mission exigeante que se fixe le secteur du tourisme social et solidaire est plus difficile à accomplir dans un  contexte de raréfaction des financements publics. Jusqu’aux années 1980, l’État et les caisses d’allocations familiales restaient des financeurs très mobilisés en faveur des structures du tourisme social et solidaire.  
La donne a changé, créant des difficultés financières pour les structures, qui subissent également l’affaiblissement des capacités d’intervention des collectivités territoriales ainsi que l’éloignement de nombreux comités d’entreprise, partenaires pourtant historiques. 

Des labels pour donner plus de visibilité au tourisme social et solidaire

Pour donner plus de visibilité au secteur, l’Ates a lancé très récemment, en 2020, le  label Tourisme Équitable®, ouvert aux voyagistes mais aussi à l’ensemble des professionnels du tourisme en France.  

 

Celui-ci est délivré sur la base d’un référentiel rigoureux portant sur 58 critères, parmi lesquels :  

  1. l’appartenance des opérateurs à l’économie sociale et solidaire (ESS) 

  2. une rémunération équitable et concertée pour chaque personne travaillant dans l’accueil des voyageurs ; 

  3. des temps de rencontre et d’échange avec la population locale ; 

  4. des hébergements chez l’habitant ou à proximité : en village, petite hôtellerie, etc. ; 

  5. des relations durables nouées avec les partenaires et prestataires ; 

  6. des groupes limités à 12 personnes afin de favoriser la rencontre avec les populations locales et le respect des équilibres locaux ; 

  7. le financement de projets de solidarité locaux répondant à l’intérêt collectif dans les pays d’accueil (si le montant dépend du prix du séjour, il représente à minima 3 % du prix payé par le client) ; 

  8. des pratiques environnementales vertueuses.

Chez les voyagistes, un nombre croissant d’agences de voyages « classiques » font évoluer leurs pratiques, dans une démarche volontariste, et intègrent de nouvelles normes pour l’ensemble ou une partie des séjours qu’elles organisent. Depuis 2004,  Agir pour un tourisme responsable (ATR)  rassemble ces professionnels du voyage, qui peuvent, s’ils le souhaitent, aller vers la labellisation ATR. Le label ATR garantit l’engagement dans une démarche de tourisme responsable contrairement au label Tourisme Équitable® qui évalue des pratiques réelles et inclut notamment un audit de terrain.  

Une adaptation nécessaire aux aspirations des vacanciers et à l’évolution de la société

Les structures du tourisme social et solidaire adaptent sans cesse leur offre pour  répondre à l’évolution démographique du public accueilli (augmentation de la part de familles monoparentales et de personnes âgées) et aux nouvelles aspirations des vacanciers. Parmi les nouvelles attentes identifiées, les structures relèvent la demande de séjours thématiques (bien-être, gastronomie ou culture, par exemple), ce qui exige une préparation particulière en termes d’animation, ou encore la demande d’un rythme d’activités élevé pour compenser la réduction de la durée des séjours et le fractionnement des vacances.

 

Pour répondre aux  enjeux de qualité et modernisation, les villages et les centres de vacances (1 400 sites à travers le pays) ont également comme mission de rénover des infrastructures vieillissantes, qui ont souvent 40 à 50 ans d’âge. Néanmoins, procéder à la rénovation et à la mise aux normes de bâtiments et d’équipements (normes d’accessibilité et handicap, qualité et confort, etc.) est  parfois complexe pour des structures sans grande capacité d’investissement.

 

L’intervention combinée de l’État, du Fonds Tourisme Social Investissement (TSI) et des collectivités territoriales, à hauteur de 20 à 30 % des opérations, peut contribuer à la réalisation de ces travaux et à la modernisation du patrimoine immobilier des structures et ainsi éviter, en dernier lieu, la mise en vente ou la reprise de l’exploitation par des opérateurs du marché lucratif.

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