Décryptage

Mobilité durable et ESS : de quoi parle-t-on ?

Publié le 31 mai 2023 - Mise à jour le 25 juin 2025
Comment diminuer l'empreinte environnementale de nos transports du quotidien ? C'est à cette question que répondent les différentes solutions de mobilité durable. Tour d'horizon.

Le concept de mobilité ne se limite pas à la question des moyens de déplacements en eux-mêmes, mais intègre, plus globalement, la capacité de chacun à pouvoir se déplacer.

 

Sept millions de Français rencontrent des difficultés dans leurs déplacements quotidiens. Les jeunes, les personnes âgées, les personnes en insertion, les personnes habitant dans les zones rurales sont les populations les plus touchées par les problèmes de mobilité.

 

Les trois piliers de la mobilité durable

Parler de mobilité durable conduit à s’intéresser à l’impact environnemental des déplacements. Si le nombre de nos déplacements augmente, de nombreux efforts doivent être réalisés afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre : véhicules électriques, autopartage, etc. Cependant, la mobilité n’est réellement durable que si elle revêt également une approche économique et sociale. La dimension sociale est d'autant plus importante que la mobilité constitue un des piliers essentiels à l’intégration sociale et à l'insertion professionnelle des individus.

Les 3 piliers de la mobilité durable 
Les 3 piliers de la mobilité durable ©Avise, juin 2015
  • 30 %

    des émissions de gaz à effet de serre sont générées par le secteur du transport.

  • 71 %

    des Français utilisent la voiture pour se rendre sur leur lieu de travail

  • 14 %

    du budget des ménages est consacré au transport.

Concilier accès à la mobilité et respect de l'environnement

Le secteur des transports représente environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France. Toute l’ambivalence de la mobilité durable consiste donc à trouver l’équilibre entre l’accès à la mobilité pour tous et le respect de l’environnement. 

Tout l’enjeu de la mobilité durable consiste à trouver l’équilibre entre l’accès à la mobilité pour tous et le respect de l’environnement.

 

De nouvelles solutions doivent donc être développées pour offrir aux citoyens une pluralité de moyens de transport (train, bus, vélo, voiture, marche…) peu consommateurs en énergie et peu chers, afin de répondre à leurs besoins et de leur assurer une mobilité sans rupture. 

 

Les Français comptent sur les autorités locales responsables des transports pour relever ce défi : 75% d’entre eux estiment que les collectivités territoriales sont les mieux placées pour développer des modes de déplacements alternatifs. Celles-ci ont tout intérêt à se saisir de cette question tant l’accessibilité d’un territoire est facteur de développement économique et d’attractivité. 

Conséquence de l’étalement urbain, les Français ont des besoins en mobilité de plus en plus importants. Que ce soit pour se rendre sur leur lieu de travail, passer des entretiens d’embauche, suivre une formation, faire du sport, assister à des spectacles : les individus sont de plus en plus dépendants de leur voiture ou des réseaux de transports collectifs.

 

Résultat : la mobilité devient discriminante. De fortes inégalités apparaissent entre les personnes qui possèdent ou non un véhicule individuel ou qui peuvent utiliser les transports en commun, que ce soit pour des raisons géographiques, physiques, financières et/ou culturelles. 80 % des personnes handicapées renoncent régulièrement à un déplacement et 50 % des personnes en insertion ont déjà refusé un emploi ou une formation en raison de leur manque de mobilité.

 

Ces enjeux sont d’autant plus importants que l’inadéquation entre les offres de mobilité existantes et les besoins des individus s’accentue du fait de certaines évolutions sociétales : dispersion spatiale des activités socio-économiques, fragmentation accrue des temps de travail, inégalités croissantes dans la population. Les jeunes, les personnes âgées et à mobilité réduite, les personnes en insertion, les personnes habitant dans les zones rurales figurent parmi les populations les plus touchées par les problèmes de mobilité. 

Avec l’augmentation du prix des carburants, les Français se détournent de plus en plus de la voiture individuelle. Si aujourd'hui 80,6 % des ménages disposent d'une voiture individuelle, 39 % d’entre eux envisagent de réduire son usage dans les prochaines années. A contrario, l’intérêt des Français pour le partage des véhicules et le libre-service est croissant. Un tiers des particuliers pratiquent ou utilisent un mode de déplacement alternatif. À titre d'exemple : 30 % des Français interrogés déclarent avoir déjà eu recours à un service de covoiturage. 

 

Les entreprises sont aussi désireuses de trouver de nouvelles solutions de mobilité, notamment lorsqu’elles emploient des personnes peu qualifiées, à horaires décalés ou amenées à effectuer de nombreux déplacements.

Une transition vers une mobilité durable au niveau international et européen

Au niveau international et européen, les politiques de transport et de déplacement sont orientées majoritairement vers la diminution des gaz à effet de serre et la réduction de la place de la voiture individuelle dans la société. Cependant, une approche plus globale et intégrée, tenant compte des trois piliers de la mobilité durable (économique, environnemental et social) se développe.

Lors de la Conférence de Paris, tenue en décembre 2015, les États se sont accordés à parvenir à limiter les émissions mondiales de gaz à effet de serre dans les meilleurs délais.

 

Le secteur des transports étant le principal émetteur de gaz à effet de serre, il est au cœur de cet accord. L’Accord prévoit que chacun des pays puisse réviser tous les 5 ans ses engagements pour diminuer ses émissions de gaz à effet de serre.

 

Autre point clé de l’Accord, la reconnaissance du potentiel d’action des acteurs non étatiques notamment les entreprises, les collectivités, et les associations. Leur participation s’articule autour de plusieurs initiatives qui permettront d’accélérer et d’approfondir une économie bas carbone.

Deuxième poste de dépenses pour les ménages européens, le secteur des transports contribue à hauteur de 5 % au PIB européen et emploie directement quelque 10 millions de travailleurs au sein de l'UE.

En vertu de l'accord de Paris, les pays de l'UE se sont engagés à rendre l'UE neutre pour le climat d'ici à 2050. Pour atteindre cet objectif, l'UE réduira ses émissions nettes de gaz à effet de serre pour l'ensemble de l'économie d'au moins 55 % par rapport aux niveaux de 1990 d'ici à 2030, et continuera de réduire progressivement ses émissions jusqu'en 2050.

Afin d'apporter sa contribution à cet objectif, le secteur des transports doit opérer une transformation qui supposera une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre (par rapport aux niveaux de 1990) d'ici à 2050.

Dans le cadre de sa Stratégie mobilité durable et intelligente, adoptée en 2020, la Commission Européenne fixe les objectifs à atteindre pour les trente années à venir.

À l'horizon 2030, la Commission européenne s'est fixée les objectifs suivants : 

  • au moins 30 millions de véhicules à zéro émission circuleront sur les routes européennes ;
  • 100 villes européennes climatiquement neutres ;
  • un trafic ferroviaire à grande vitesse doublé ;
  • des déplacements collectifs programmés de moins de 500 km neutres en carbone au sein de l’UE ;
  • une mobilité automatisée déployée à grande échelle ;
  • des navires à zéro émission prêts à être commercialisés.

À l’horizon 2035, la Commission s'est fixée les objectifs suivants :

  • des aéronefs de grande capacité à zéro émission prêts à être commercialisés.

Enfin, à l’horizon 2050, les objectifs sont les suivants :

  • la quasi-totalité des voitures, camionnettes, autobus et véhicules utilitaires lourds neufs à zéro émission ;
  • un trafic ferroviaire de marchandises doublé ;
  • un trafic ferroviaire à grande vitesse triplé ;
  • un réseau transeuropéen de transport multimodal (RTE-T) équipé pour des transports durables et intelligents dotés d’une connectivité à haut débit opérationnel pour le réseau global.

En France, des objectifs de développement durable

Les lois Grenelle

Adoptées en 2009 et en 2010, les lois Grenelle ont pour objectif de promouvoir le développement durable et de concilier la protection et la mise en valeur de l’environnement avec le développement économique et le progrès social.

 

Le volet « transport » de ces lois s’est attaché à la dimension écologique des déplacements, principalement à travers deux objectifs :

  • le développement de transports collectifs et partagés via l’évolution des infrastructures et des comportements ;
  • la réduction des émissions de gaz à effet de serre. 

Stratégie nationale pour la transition écologique vers un développement durable (2015-2020)

Adoptée en 2015, la Stratégie nationale pour la transition écologique vers un développement durable 2015-2020 (SNTEDD) fixe de nouveaux objectifs pour la France "en matière de développement durable, en insufflant une vision transversale et de long terme, pour répondre aux enjeux interdépendants de la transition écologique et à leurs implications économiques et sociales".

 

Dans le but de répondre à cet objectif, la stratégie est constituée de neuf axes. La question de mobilité durable est transversale à ces axes, elle s’est appuyée sur le rapport Mobilité 21 – Pour un schéma national de mobilité durable de juin 2013 pour identifier les enjeux et défis à relever : la desserte et l’accessibilité des territoires nationaux et européens, les besoins de mobilité du quotidien, les enjeux environnementaux et énergétiques et la soutenabilité financière.

 

Cette stratégie nationale, tout comme la précédente (la SNDD), ne se borne pas aux implications écologiques de la mobilité durable, mais prend aussi en considération ses enjeux économiques et sociaux. Elle met en avant l’importance de l’accès à la mobilité pour lutter contre toutes formes de précarité ou d’exclusion sociale. 

 

Les choix stratégiques de la SNTEDD consistent à : 

  • promouvoir des pratiques de mobilité plus durables pour les personnes et les biens, en favorisant la proximité ;
  • renforcer l’intermodalité et développer des alternatives au transport routier et aérien ;
  • améliorer l’efficacité énergétique des véhicules, réduire leurs émissions et promouvoir les énergies alternatives ;
  • veiller à l’accès aux services et à la mobilité pour tous et sur tout le territoire. 

Loi sur la transition énergétique pour la croissance verte 

La loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) vise à permettre à la France de contribuer plus efficacement à la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de l’environnement ainsi que de renforcer son indépendance énergétique tout en offrant à ses citoyens et ses entreprises l’accès à l’énergie à un coût compétitif. 

 

La LTECV couvre différents domaines clés de la transition énergétique dont les transports. Elle vise ainsi à développer les transports propres, notamment en fixant un objectif de 7 millions de points de recharges pour les véhicules électriques en 2030. Comment ? En imposant notamment le renouvellement des flottes publiques par une proportion minimale de véhicules à faibles émissions, en développant des modes de transport alternatifs comme le covoiturage ou l’autopartage ou encore en permettant des mesures de restriction de la circulation dans les zones affectées par une mauvaise qualité de l’air.

 

Par ailleurs, la loi rend obligatoires les plans de mobilité dans les entreprises situées dans les zones affectées par une mauvaise qualité de l’air afin de favoriser des modes de déplacement alternatifs à la voiture individuelle. 

 

La loi Granguillaume sur les transports d'utilité sociale

L’article 7 de la loi Grandguillaume du 29 décembre 2016  introduit la notion de transport d’utilité sociale. Il autorise ainsi les associations à « organiser des services de transport au bénéfice des personnes dont l'accès aux transports publics collectif ou particulier est limité du fait de leurs revenus ou de leur localisation géographique ». Les associations fournissent ces prestations à titre non onéreux mais peuvent demander aux bénéficiaires de participer aux coûts du service de transport. 

 

Ainsi, le décret du 20 août 2019 vient préciser les conditions financières et géographiques d’accès au transport d’utilité sociale pour les bénéficiaires et encadre le fonctionnement du service et le montant de la participation aux frais.

 

La loi d'orientation des mobilités (LOM)

La loi d’orientation des mobilités (LOM), publiée en 2019, a l’ambition d’intégrer des enjeux sociaux et environnementaux dans le cadre général des politiques de mobilité. Elle repose ainsi sur plusieurs objectifs : 

  • Développer des transports du quotidien : réorientation des investissements vers des projets de transport du quotidien, fort investissement dans le ferroviaire, priorité à l’entretien, la réparation et la modernisation des réseaux de transport existants.
  • Permettre la mobilité pour tous en luttant contre les zones blanches de mobilité : possibilité pour les communautés de communes de se saisir de la compétence de mobilité (dans le cas contraire, elle revient à la région) et de devenir, ainsi, autorité organisatrice de la mobilité (AOM), rendre ces AOM compétentes en matière de mobilité solidaire, mettre en place un versement mobilité, développer de nouvelles formes de mobilité (covoiturage, autopartage, etc.).
  • S'engager dans la transition écologique : réduire les émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % d’ici 2030, interdire les ventes de voitures à énergies fossiles carbonées à partir de 2040, rendre la mobilité plus propre (lancement d'un nouveau plan vélo, prime à la conversion, augmentation du nombre de points de recharge publics pour les véhicules électriques, etc.), intégrer les entreprises dans la démarche, permettre aux communes de créer des zones à faibles émissions (ZFE), etc.

Le Plan France 2030 : accélérer, digitaliser et décarboner les transports

Alors que les transports représentent 30 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau national, le Plan France 2030 prévoit un investissement de 570 millions d'euros dans la digitalisation et la décarbonation des mobilités. Cette stratégie vise prioritairement des objectifs de transition écologique, de compétitivité économique, de cohésion des territoires, de souveraineté et de résilience. 

 

Elle s'articulera autour de trois axes : 

  • concevoir le ferroviaire de demain et optimiser son exploitation, à travers le développement de trains légers et d'une meilleure couverture du territoire, du développement d'un réseau ferroviaire 4.0 et du fret ferroviaire automatisé ;
  • optimiser, sécuriser et décarboner les transports massifiés et leurs interfaces multimodales à travers le développement d'un réseau logistique 4.0, le "verdissement" des usages du maritime et du fluvial et la mise en place de terminaux critiques sécurisés, numérisés et décarbonés ;
  • le développement de nouvelles offres de transports automatisés et décarbonés, qui passera par le soutien aux services, systèmes et véhicules de transport routier automatisés et de solutions de route intelligente et bas-carbone.

Découvrez notre webinaire consacré à la mobilité durable !

Organisé en juillet 2020 dans le cadre du projet Tressons et du cycle de webinaires ESS & ruralités initié par l’Avise et le RTES et dédié aux initiatives et dynamiques de l’ESS dans les territoires ruraux, ce webinaire retrace les enjeux du manque de mobilité dans les territoires ruraux et brosse un panorama des initiatives des acteurs de l’ESS pour promouvoir et développer des solutions de mobilité inclusive et plus durable, mais aussi pour repenser le déploiement de certaines activités à travers des formes itinérantes, pour se rapprocher des habitants. 

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